Quelque part en Outreterre

La petite citée de Eryndlyn se trouve non loin de la frontière entre l’Outremonde et la surface, ce qui en fait un lieu d’échange cosmopolite mais dangereux pour celui qui ne sait pas comment l’aborder. Dans cette petite bourgade se trouve un marché réputé pour ses affaires à bon prix (et ses arnaques aussi). Parmi la foule qui se masse autour des marchands drow, duergars, rivvin (humain habitant l’outreterre) et autres races commerçantes, on distingue un groupe de trois personnes. Ce groupe est d’autant plus reconnaissable, puisqu’on peut y compter un Banni drapé de noir de la tête aux pieds, un elfe de la surface avec une tenue de Sindar resplendissante et un être d’où se dégage une aura malsaine. Le Sindar, probablement le leader du groupe, fait signe aux deux autres de le suivre dans une petite auberge (« Le Pendu arrosé »), un endroit assez calme pour y faire affaire d’après le Sindar. A l’intérieur, le patron (un Drow) les salue vaguement et préfère les ignorer, au plus grand plaisir du groupe.

Le groupe va s’asseoir dans un coin de la taverne. Le Banni abaisse sa capuche et une multitude de cheveux nacrés vient inonder son visage. D’un geste gracieux de sa main, il dégagera chacune de ses mèches. Son visage est fin, attirant avec un certain charisme qui en transparaît accentué par quelques cicatrices qui viennent ponctuer ses traits ici ou là. Le Drow joint ses mains sous son menton et baisse son regard d’un air mélancolique qui ne le lâche jamais. Il s’exprime alors d’une voix fluette et douceâtre :

- Mentor, mes guerriers endurent des pertes considérables à la frontière mais nous avons réussi à proscrire une guerre ouverture entre les deux royaumes.
- Bien, Nîmwendil, murmura le Sindar.

Le Sindar qui n’était autre que Celebnor, un simple tavernier mais qui s’avère être en fait le chef d’une petite confrérie secrète. Son regard d’un vert luisant se pose ensuite sur le dernier compagnon, un homme grand, au visage androgyne, des cheveux long d’un blanc tirant sur l’argenté. Ses yeux aussi possèdent cette couleur argenté. Une aura démoniaque émane de lui, envoûtante et effroyable à la fois. Le démon répond alors de sa voix juste et hypnotique :

- Je suis prêt selon vos ordre, mon maître. Mais je sens que l’esprit de Nîm est perturbé par quelque chose de futile.
- Nîmwendil, est-ce vrai ? Demanda Celebnor.

Le Drow baissa encore les yeux et laissa échapper un long soupir. Ses yeux était fixé sur son anneau qui sied à son auriculaire, ce même anneau qu’il confierait à l’un de ses guerriers pour mission. Il secoue la tête et jette un regard vers le démon d’un air menaçant :
- « Je suis prêt à me sacrifier pour notre cause, Celebnor. Et toi, Zanshi, si tu essayes encore de me fouiller mon esprit, tu te retrouveras avec deux dagues dans ta petite gorge d’infernal … » dit-il.

Puis il porta rapidement sa main dans le pan de sa manche et envoya un trait qui s’envola droit et mortel dans la trachée d’un Drow qui les regardait d’un air de défi. L’elfe noir se recroquevillait maintenant sur lui-même, se tenant désespérément la gorge en poussant quelque gargouillis rauque puis la lueur s’estompa dans ses yeux. Le tavernier observa la scène, grogna puis haussa les épaules. Rien de plus normal en Outreterre. Zanshi observa Nîm et éclata d’un rire cristalin : « Je vois que tu n’as pas perdu tes reflexes, hein ? Allez … allons-y avant que ses copains rappliquent »

Tandis que le groupe sortait de la taverne glauque, l’elfe noir était resté. Il observait toujours son alliance d’un air abattu : « Ussta ssin'urn malla mrimm d'ssinss Faris* … Rien que d’évoquer ton nom élance un goût âpre et acerbe dans ma bouche. M’as-tu oublié ? Ne m’aimes-tu plus ? Peut-être a-t-elle choisi de vivre avec quelqu’un d’autre … » murmure-t-il pour lui-même, l’œil vague. Il se lève de sa chaise, soupire puis regarde autour de lui. Une partie de son visage reste dissimulé derrière ses longs cheveux blancs. Il déglutit d’un air peiné comme si son cœur pesait trop : « Si elle a choisi quelqu’un d’autre, je n’ai plus droit de penser à elle, je n’ai plus le droit de la revoir … C’est mon devoir envers ussta malla Ilharess ** » à ses mots, le Drow enlève l’alliance de son doigt et la laisse tomber dans la poche de son manteau noir. Il relève ses yeux, inspire à fond puis reprend la marche vers la sortie. Un plan se forme dans son esprit, il va envoyer un de ces hommes à la recherche de son aimée, lui envoyer un message puis voir la réaction de cette dernière. L’espoir renaît dans son cœur meurtri, mais il craint le pire aussi. Ses traits s’assombrissent et voilà que renaît le Drow qu’il était auparavant … Il n'a plus peur de la mort maintenant.

~* Une jeune femme, de taille moyenne, sèchement musclée, la peau hâlée, les cheveux noirs et les yeux gris, déboule en gromellant de l'arrière boutique. Et encore un assassinat en public ! Décidément, Sao ne se plaisait guère dans ce taudis. A part ramasser - et parfois dépouiller, les morts, elle n'a pas grand chose à faire à Eryndlyn. Mais cette fois, pas question de toucher au Drow qui fut la cible de Nîmwendil, il est trop bien entouré par ses anciens camarades.

Sao soupire, un râle de dégoût s'échappe de sa gorge. Qu'est-ce qu'elle est venue faire ici déjà ? Elle qui ne se sent en bonne compagnie qu'aux côtés de son loup sanguinaire. La jeune femme qui a grandi à l'extérieur des villes, et ne supporte pas la présence d'humanoïdes, se demande vraiment ce qu'elle fabrique dans une cité aussi glauque ... Elle se rappelle alors le visage éthéré de cet ... être, celui qui parlait dans sa tête, qui se présentait sous le nom de Coeur et Sang de loup - le nom idéal pour aborder Sao.

Un message ? Ouais. Il lui avait confié un message. C'est pour ça qu'elle s'était traînée jusque là. C'est pour ça qu'elle bossait dans cette taverne - bien que le fait de dépecer les cadavres lui procure une certaine compensation largement satisfaisante.

Les compagnons du Drow assassiné par Nîmwendil s'échauffent. Sao ne comprend ni les gestes ni la langue même des habitants de l'Outreterre, mais il ne faut pas être une flèche pour se douter que les représailles sont proches. Une odeur attire l'attention de Sao. Cette empreinte olfactive lui avait été confiée par l'esprit errant, Coeur et Sang de loup. A défaut de pouvoir retenir un nom ou un visage, Sao reconnaît très bien les odeurs qu'elle croise. Les yeux de la jeune femme se posent instinctivement sur Nîmwendil. La jeune femme se précipite à la table du Banni et lui saisit le bras : *~


" Posez pas de questions et suivez-moi ! "


~* A peine croyable, mais Sao sait aligner des mots pour faire une phrase. Et à peine croyable également, elle n'hésite pas à forcer la main à Nîmwendil. Le Banni comprendra sûrement de quel côté la jeune femme se trouve lorsqu'il aura deviné leur point lupin commun ... *~

Il est vrai qu’au contact avec la peau de Sao, le cœur de Nîmwendil sait instinctivement qu’ils sont pareils. Certes pas du même clan mais de la même « race », c’est pourquoi il se laisse faire et suit Sao sans opposer de résistance. Cependant, d’un geste vif et précis, il sortira l’un de ses cimeterres qui viendra tinter contre le fourreau qui se trouve dans le bas de son dos. Le Drow tiendra son cimetière avec robustesse, lame vers le bas se fixant solidement contre l’avant de son bras. Voilà une technique de combat d’un maître-lame qui n’échappera pas à l’œil avisé de Sao. Entre chaque doigt de son autre main, de petites lames acérées et légères qui forment un éventail luisant. Son œil est ardent et tranchant comme l’acier : « Si nous fuyions, mon amie, ils nous retrouverons et nous aurons le déshonneur au-dessus de nos têtes. Il faut relever le défi, sinon, nous devrons fuir l’Outreterre … et aujourd’hui, j’ai soif de sang » murmure-t-il, un léger sourire s’étirant sur ses lèvres. Il se met rapidement en position de combat devant Sao, ses long cheveux neige venant noyer son visage déterminé.

En face, la petite compagnie commence à charger ...

~* Sao ne peut comprendre les intentions de Nîmwendil que par instinct. Elle ne cotoie pas assez d'humanoïdes pour prétendre comprendre et accepter leur comportement. Le Banni a de la chance ; la jeune femme supporte assez mal la compagnie des "croulants à deux pattes", et ne tient pas à son travail dans cet établissement miteux - d'autant plus qu'elle comprend bien avoir trouvé le destinataire du message qu'on lui a confié ...

Sao laisse échapper un nouveau grognement. La jeune femme n'est pas très haute, et surtout son gabari laisse à penser qu'elle est fragile - musclée, Sao n'en est pas moins sèche. Elle ne connaît pas le sens du mot "honneur". Tout au plus, Sao est capable de faire montre de fierté, ou d'instinct de survie. Si ça ne tenait qu'à elle, la jeune femme chercherait plutôt à trouver une issue discrète. Mais puisque Nîmwendil semble en avoir décidé autrement, et mettre volontairement sa vie en danger ... Sao estime ne pas avoir d'autre choix que de faire front à ses côtés.

Les Drows chargent. Sao n'a pas d'arme sur elle, elle ne se sert que de ses poings et de son agilité. Alors que le combat est inévitablement engagé, la jeune femme se tiendra à distance raisonnable du Banni, ne souhaitant pas recevoir un coup de cimetère ... Sao se contente d'induire ses adversaires en erreur, les faisant foncer dans les murs ou les poutres autant que possible. Elle est également ravie de constater à quel point les "croulants" d'en face semblent impuissants lorsqu'on leur retire leurs armes de poing.

La jeune femme ne manquera pas de se prendre quelques mauvais coups de la part de ses adversaires, lorsqu'elle décidera de s'inquiéter du sort de Nîmwendil ... Il est probable que dans sa fuite, Sao se mette à boîter. *~

Une vague de traits vient s’empaler dans les corps de quelques uns des opposants qui s’écroulent rapidement. Nîmwendil semble posséder une expertise mortelle du lancer de couteau, qui d’ailleurs était sa première formation lorsqu’il était encore qu’un jeune serviteur de Lolth. Une fois au corps à corps, c’est sa lame qui parle pour lui. Un déluge de mort s’abat sur quiconque s’approche du Drow qui semble en transe, dans une sorte de concentration extrême. Pourtant, le style de combat de Sao vient perturber cette concentration. Il n’a jamais vu un tel style, d’ailleurs, il s’imagine de suite que Sao ne sait pas se battre et comprend alors qu’il a commis une erreur en l’invitant à se battre. Il tente désespérément de se rapprocher d’elle pour la protéger mais cette dernière semble craindre son arme. C’est alors qu’il remarque que la compagnie possède un franc-tireur avec une arbalète chargée d’un carreau à la couleur noirâtre. Comment a-t-il été aussi bête ? Il a commis trois erreurs : la première étant de se battre avec une non-combattante, la seconde réside dans le fait que son attention a été détournée quelques secondes, la troisième, il n’a pas essayé de savoir s’il y avait un tireur isolé à éliminer. Son regard se pose sur le carreau puis sur Sao. D’un geste désespéré, il lâche son arme principale et porte rapidement sa main dans le pan de sa manche pour lancer une dague.


Tandis que la dague se plante entre les deux yeux du tireur, le Drow sent quelque chose de chaud couler le long de son ventre. La sensation n’est pas désagréable, le liquide chaud semble le réconforter puis c’est à ce moment que la douleur commence à irradier ses entrailles. Il baisse les yeux et voit une lame noire plantée un peu en dessous de son nombril. Il esquive difficilement une seconde qui viendra entailler sa chaire au niveau de ses côtes. Il tombe au sol puis sa main se referme sur la garde de son cimeterre qui luit étrangement. Faris. Il se lève, pose un dernier regard sur Sao puis s’engage dans une fureur inconsidérée comme une bête traquée. D’une main, il tranche et de l’autre il essaye tant bien que mal d’étrangler ses adversaires.

Un visage. Sa vision se trouble légèrement au fil du combat et il commence à sentir ses muscles trembler : Velkyn Ogglin, L'Ennemi Invisible, un poison rare extrait des poches à toxines d'un poisson peu commun appelé "dakhree" qui évolue dans certains lacs d'Ombreterre. Le préparateur doit extraire les poches avec des gants s'il veut éviter d'être lui même empoisonné. Les poches sont situées tout le long du corps de 15 cm du poisson, et sont minuscules, requérant une main sûre et délicate pour les extraire, d'où sa rareté. Le "dakhree" chasse en se frottant contre sa proie, libérant le venin sur sa proie. Sur la plupart des poissons l'effet est instantané mais plus long sur les humanoïdes. Quand le poison commence à agir, la victime entre en convulsions, les substances toxiques attaquant son système nerveux. La victime entre en crise d'épilepsie alors qu'il subit des lésions de la moelle épinière, son dos se cambre et se tord violemment quand son corps est involontairement secoué de spasmes. Nimwendil ne connaît que trop bien ce poison, pour l’avoir longtemps utilisé. Heureusement, il n’est pas mortel mais le Drow sait que s’il ne se soigne pas rapidement, il risque d’être paralysé à vie.


Il poussera un dernier cri de rage avant de foncer sur ses derniers opposants, des larmes coulent le long de ses joues. Elle. Il se fait encore entaillé mais ne ressent plus la douleur, un effet double du poison qui dévore ses nerfs. Faris. Il s’écroule et pose son regard sur Sao. Il n’y a plus personne autour d’eux, car tout le monde a fuit le combat. Il sera surpris de voir que la jeune fille a réussi à assommer une bonne partie de la compagnie. Il lui doit sûrement son salut. Le liquide bouillant continue de pulser contre la lame enfoncée. Il ne doit pas l’enlever, c’est la mort assurée pour lui. Aimer. Il fouille dans sa poche et en sort un flacon qu’il débouchonne avec l’aide de son pouce avant d’avaler le contenu d’une traite. Il rampe puis se pose contre un des murs de la taverne. Quelques Drows l’ayant vu combattre inclinent la tête honorablement puis continue leur chemin. Rien de plus normal en Outreterre. Il presse sa main contre sa blessure puis sent son esprit vasciller… C’est alors qu’un chant en Sindarin vient résonner dans sa tête, un chant qu’il avait l’habitude d’entonner en Deneria pour Faris :

~* La présence de Nîmwendil aura indéniablement été salutaire à Sao. Comme le Banni semble l'avoir bien deviné, en plus de son aversion pour les armes, la jeune femme présente une certaine incapacité à se battre de front. Heureusement pour Sao, toutes ces années passées en extérieur ont largement travaillé sa souplesse - entre autres choses.

Le combat a cessé, et c'est Nîmwendil qui a fait le plus gros du travail. La jeune femme a conscience d'avoir été un poids pour le Banni dans l'affrontement. Mais elle ne culpabilise pas pour autant. Elle sait les membres de son sang solides. Et lorsque Sao vient reniffler la plaie de Nîmwendil, accroupie face à son compagnon d'infortune, la jeune femme passe machinalement sa langue sur ses lèvres. Puis elle murmure à l'oreille du Drow, de sa voix rauque et profonde : *~


" Soif de sang, hein ? En attendant, vous avez failli y rester en beauté, et j'ai manqué de perdre l'usage de mes jambes à plusieurs reprises ... Maintenant vous êtes fixé. Quand je vous demanderai de me suivre sans faire d'histoires, vous y réfléchirez à deux fois avant de vous lancer à corps perdu dans la bataille, avec un boulet dans vos pattes. Je ne me bats que pour chasser, pour me nourrir, et jamais par plaisir. Un concept apparemment difficile à digérer dans la région. Quant à cette chose que vous appelez 'honneur' ... Je n'ai absolument pas conscience de ce que cela peut être. Mais, m'est dans l'idée que, mort, l'honneur ne vous servira plus à grand chose. Alors en route maintenant. Je sais où on pourra vous soigner. Même si je boite, vous feriez mieux de vous appuyez sur moi pour tenir la distance. "


~* Il est presque étonnant de constater avec quelle volonté et désinvolture Sao s'adresse à Nîmwendil. Chacun ignore encore le nom de l'autre et pourtant, la jeune femme est apparemment prête à jouer des pieds et des mains pour faire sortir le Banni de la cité.

Malgré ses lacunes dans le domaine martial, Sao est une bonne infirmière, et jamais elle n'aurait songé à retirer la lame ênfoncé dans la chair du Drow. Elle compte sur ses talents d'herboriste afin de pouvoir tenir Nîmwendil hors de toute forme de délire ou de souffrance. Mais en Outreterre, il va falloir s'accrocher ... *~

Sao se penche donc à l’oreille de Nîmwendil. Bien que son esprit soit embué par la douleur et le poison, il n’en reste pas moins conscient. Il entend chaque parole de sa consoeur et s’interroge rapidement, car dans son clan de Ragenuit, l’Honneur possède une place forte importante pour les membres, qui sont par ailleurs sélunites et donc ennemis des dévots de Shar, la déesse du mal. Il se demande alors si celle qui lui parle, qui porte une odeur familière, n’est pas membre de l'Ordre de la Lune Noir. Son visage se durcit et sans prévenir sa main se referme sur la gorge de l’Humaine qui avait abaissé son attention pour lui parler à l’oreille. Sa poigne est fébrile mais même un Drow affaibli reste dangereux : « Dos nau zhah ussta malla Ilharess, rivvil * ! Et tu ne fais pas parti de mon clan. Qui es-tu ? Que me veux-tu ? Es-tu là pour m’éliminer ? Qui t’envoies ? Si tu ne me dis rien, je jure sur Selune de te tuer avec le poignard qui me transperce, quoiqu’il m’en coûte … » sa voix est dure, sèche, presque aussi cinglante que son épée. Ses yeux, eux, laissent transparaître toute la beauté de l’âme de Nîmwendil : de la générosité, de la passion, de la loyauté, de l’amour … le sacrifice. Une pensée s’invite alors inopinément dans sa tête, une pensée récurrente : « m’aime-t-elle encore ? ».

~* Les traits de Sao se durcissent. Pas étonnant que le Banni réagisse aussi mal. Le tact n'est pas le point fort de la jeune femme. Heureusement pour elle, il ne lui est pas difficile de se libérer de la poigne de Nîmwendil. D'un mouvement net, précis et sèchement orchestré, la main droite de Sao vient la libérer de l'étreinte du Drow meurtri. Alors, elle ne se prive pas de reprendre la parole, et ce malgré le bras de fer qui s'engage entre les deux compagnons d'un jour : *~


" Qui vous dit que je fais partie d'un clan ? Et inutile de me parler dans la langue des croulants à peau sombre et cheveux d'argent. Je me sens déjà assez salie de parler et comprendre le commun, je ne vais pas en ajouter à mon fardeau. Je m'appelle Sao - Sao les Crocs noirs. Je ne suis pas là pour vous tuer, sans quoi j'aurais laissé faire ces abrutis. Je ne sers aucun dieu, et ne fais partie d'aucune meute. J'ai message pour vous, qui vous ordonne de revenir à la source. La soure des lycans, j'entends ... "


~* "La source des lycans", Nîmwendil la connaît. C'est là-bas que réside l'esprit de Coeur et Sang de loup, à la fontaine de guérison, en bordure de la cité d'Amoria. La main qui était venue serrer la gorge de Sao se relâche, et la jeune femme en profite pour se relever - elle aurait préféré claquer le bras de Nîmwendil contre le mur, mais elle a dans la tête l'idée de ne pas trop l'abîmer.

La jeune femme s'étire et teste la résistance de sa jambe blessée. Encore une chance que les lames des Drow n'étaient, pour la plupart, aucunement empoisonnées. Les plaies suintantes de Sao commencent à se refermer, expulsant d'elles-mêmes les doses de poison. Ce travail ne se fait pas sans une certaine souffrance pour la jeune femme, qui s'en mord férocement la lèvre inférieure ...

Cette régénération miraculeuse est caractéristique des lycans. Le plus étonnant pour Nîmwendil est de constater que malgré l'errance de Sao - entendre par là son détachement par rapport aux clans existants, la jeune femme semble parfaitement capable de mettre à profit ses compétences naturelles. Sao les Crocs noirs. Pas de clan. Pas de maître. *~

« La source, hein ? » dit-il d’un ton dédaigneux. Oh, c’est sûr qu’il la connait cette fameuse source des Lycans pour y avoir été, un peu après avoir succombé à sa bête intérieure et avoir commis d’innombrables crimes qui le déshonorent encore aujourd’hui. Il commence à rire jaune puis son regard se fixe sur celui de Sao : « Est-ce ce vieux fou qui t’envoie ? Je le connais, car c’est à lui que j’ai demandé d’ôter ce qui faisait de moi un véritable lycanthrope. Il s’est exécuté et voilà qu’il veut me revoir ? Pourquoi ? » Murmure-t-il, sa voix s’affaiblissant durant les phrases trop longues. Il se relève difficilement, prenant appuie contre le mur. Le dard est toujours enfoncé dans son abdomen. Il continue de regarder Sao : « Tu es son pion et tu te dis sans maître ? », il recommence à rire, peut-être pour provoquer Sao. Il lui tient tête et ne la suivra pas avant de savoir de quoi il en découle : « Que me veut ce vieux sage ? »

" Je ne fais qu'obéir à mon instinct. Certaines lois de la nature ne sont pas faites pour qu'on les comprenne. Vous vous moquez de moi mais ... Vous qualifiez cet esprit protecteur à la fois de sage et de fou. Il vous a rendu un grand service si je ne m'abuse - puisqu'il a fait ce que vous lui avez demandé. Je ne pense pas qu'il songe à vous redonner ce qu'il a pris. Il veut simplement que vous rentriez. Et je suis là pour vous accompagner. "


~* Sao est à peine perturbée par l'attitude provocatrice de Nîmwendil. "Même une fois coupée, la tête du loup peut encore mordre". Le Banni, blessé de son état, illustre parfaitement le proverbe. Toutefois, afin de ne pas être tentée de coller une gifle monumentale - voire pire, à son frère de sang, Sao ne prendra pas la peine de se tourner vers son interlocuteur lorsqu'elle lui répondra.

La jeune femme peut comprendre l'attitude renfrognière de Nîmwendil. Sao lui est tombé dessus sans prévenir, l'a géné en combat et est plus que désagréable avec lui par moments. La jeune femme n'est cependant toujours pas décidée à laisser le Banni derrière elle. Et puis elle se dit que c'est peut être sa seule occasion de pouvoir se rendre à la source des lycans ... *~

Nimwendil observe attentivement Sao, son attitude, sa voix, ses yeux, ses mots … Le Drow peut aisément pénétrer l’esprit des gens rien qu’en les observant. Le langage du corps pour un elfe noir est plus significatif que la parole. Il sent en Sao sa curiosité, son envie de découvrir la source, sa témérité. Il incline la tête : « Bien … si après ça, tu me laisses en paix, je vais te suivre » dit-il avant de porter sa main vers le poignard. Il fait la moue et commence à rire : « Par Eilistraee, j’ai bien failli y passer. Mes organes n’ont pas été touchés. Quel étrange trophée !» dit-il entre deux fous rires où il se plie en deux à cause de la douleur que lui provoque ses rires. La tension semble être tombée d’un coup entre les deux acolytes. Il relève son regard pourpre sur Sao : « Au fait, je me nomme Nîmwendil et si tu sais comment m’enlever cette chose, j’en serai ravis … »

~* Et encore une réaction que la jeune femme ne comprend pas. Pourquoi "Nîmwendil ...?" - si c'est bien le nom qu'elle vient d'entendre, est-il en train de rire ? Il est blessé et il ne va sûrement pas arranger les choses en secouant perpétuellement son corps sous le coup d'un rire nerveux. Sao soupire et se retourne vers le Banni, posant un genou à terre : *~


" Enfin vous devenez raisonnable. Ouais on va vous soigner ça, sans quoi vous n'irez pas bien loin. Laissez-moi voir ... La lame a tranché net et ne ressort pas de l'autre côté. Vous dîtes qu'aucun organe n'a été touché. Le mieux serait donc que vous la retiriez vous-même d'un coup sec. Et si j'ai bien compris, chez vous, pas la peine de compter sur une régénération spontanée, l'esprit a du vous retirer ça en contrepartie de votre requête. Bon ... Il ne me reste plus qu'à mettre mes compétences à profit. Le fait d'être moi même un croulant peut avoir certains avantages dans certaines situations, apparemment. "


~* La jeune femme préfère toujours dire ce qui lui passe par la tête plutôt que de se taire, quitte à se perdre en affabulations ... Sao se met à jouer avec ses ongles, c'est l'attitude qu'elle adopte lorsqu'elle réfléchit. Les yeux rivés vers le plafond, elle porte l'index gauche à sa bouche et se met à en mordiller l'ongle.

Si la jeune femme ne porte jamais de sac, c'est parce que ... [Tour de magie du Néant - lvl 0 apprentie du Chaos] elle n'en a tout simplement pas besoin. Il y a longtemps, on lui a appris à stocker ses affaires dans un autre plan.

Une fiole vient de lui tomber dans la main. Une potion de [Guérison suprême]. Sao ne se sert pas souvent de la magie en dehors de ce sortilège fort pratique dans la vie de tous les jours. Par contre, elle a du mal à se souvenir où elle a bien pu apprendre ce sortilège : *~


" Je vous recommande de boire ça tout de suite après. Je me charge de vous faire avaler ça, vous ne serez pas capable de grand chose après avoir retiré cette lame ... "